Le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation installe progressivement un système qui détruit les cadres nationaux des concours, qui instaure le remplacement d’emplois statutaires par des contrats à durée déterminée et des recrutements précaires hors des statuts qui garantissent l’indépendance du travail scientifique. Ces transformations majeures réduisent les protections nationales et développent l’insécurité de l’emploi. Il est à craindre qu’à moyen terme, elles soient particulièrement préjudiciables, non seulement aux universitaires titulaires, mais aussi aux contractuels qui exercent aujourd’hui des tâches fondamentales dans tous les métiers de l’Enseignement et de la Recherche.
Poursuivant cette logique d’atteinte directe et violente à la liberté académique, le ministère a fait savoir début décembre qu’il entendait supprimer dès 2023 la procédure nationale d’avancement de grade pour les universitaires titulaires. Jusqu’à présent, une procédure nationale leur permettait d’être promus sur la base de la reconnaissance par les pairs, siégeant au sein d’une instance représentative, le Conseil National des Universités (CNU). Pour l’avancement de carrière, cette procédure coexiste avec l’examen de la demande dans l’établissement d’affectation du demandeur : un passage au grade supérieur peut ainsi être obtenu par la voie nationale ou par la voie locale. La suppression de la procédure nationale signifie que, dorénavant, les promotions relèveront exclusivement de commissions locales, confrontées directement aux politiques localisées des directions d’établissement, sans vision large des enjeux scientifiques et disciplinaires nationaux. Ainsi, dans un contexte de dotations insuffisantes, l’octroi de toutes les promotions sur des critères de convenances locales ne peut qu’accentuer les tensions au sein des équipes et entre les équipes.
Cette initiative est extrêmement grave. Elle compromet l’intégrité, la diversité et la qualité du travail universitaire. En effet, elle ampute le CNU de ses principales compétences décisionnelles et confère aux chefs d’établissements une capacité exclusive de décision de toute promotion au sein des corps universitaires.
Après la disparition du filtre de la qualification aux fonctions de professeures et professeurs des universités en 2020, la disparition de la procédure nationale d’avancement des carrières distend le contrôle par les pairs de la même discipline au niveau national.
L’équilibre entre le local et le national est gage d’indépendance.
La liberté et l’intégrité académiques ne peuvent être garanties que par une reconnaissance reposant prioritairement sur l’examen des travaux par les pairs au niveau national, dans un cadre limitant le risque de clientélisme, de localisme et de conflit d’intérêts. La suppression de tout cadre national dans la gestion des carrières académiques annonce une dérégulation totale de l’Université. Les crises que nous traversons nous montrent pourtant chaque jour un peu plus que l’avenir de notre société et de notre jeunesse dépend de la capacité de la recherche scientifique et de l’Université à rester ouvertes, à se renouveler, à inventer des solutions pour demain et à jouer ainsi le rôle d’émancipation qui est le leur.
Nous vous invitons à signer et faire signer cette pétition le plus largement possible. Si vous travaillez dans l'ESR, nous vous invitons à préciser après votre nom et votre prénom (dans la rubrique pseudo), votre statut, votre discipline (pour les chercheurs, chercheuses, EC, doctorants, doctorantes, postdoc ...), votre établissement d'appartenance et vos éventuelles fonction dans les instances universitaires (membre de Conseil, directeur/rice de composante, directeur/rice d'unité de recherche, vice-président/e, président.e d'établissement ...).
Premiers signataires
Sylvie Bauer, professeure de littérature américaine à l’université Rennes-II, présidente de la commission permanente du Conseil national des universités ;
Dany Chevalier, maître de conférences de Toxicologie à l’université de Lille, vice-président de la commission permanente du Conseil national des universités ;
Christine Chojnacki, professeure de langues et cultures indiennes, université Jean Moulin Lyon-III vice-présidente de la commission permanente du Conseil national des universités ;
José Darrozes, maître de conférences en géosciences, université Paul Sabatier, Toulouse III, vice-président de la commission permanente du Conseil national des universités ;
Thierry Divoux, professeur en génie informatique à l’université de Lorraine, vice-président de la commission permanente du Conseil national des universités ;
Sylvain Ferez, maître de conférences en sciences et techniques des activités physiques et sportives à l’université de Montpellier, vice-président de la commission permanente du Conseil national des universités ;
Alexandre Fernandez, professeur d’histoire contemporaine à l’université Bordeaux-Montaigne, vice-président de la commission permanente du Conseil national des universités ;
René Guinebretière, professeur en physique des matériaux à l’université de Limoges, vice-président de la commission permanente du Conseil national des universités ;
Gilles Mailhot, Directeur de Recherche CNRS en chimie à l’université Clermont Auvergne, vice-président de la commission permanente du Conseil national des universités ;
Arnaud Martinon, professeur en droit privé à l’université Panthéon-Assas, vice-président de la commission permanente du Conseil national des universités ;
Thierry Oster, professeur de biochimie et biologie moléculaire à l’université de Lorraine, vice-président de la commission permanente du Conseil national des universités ;
Fabrice Planchon, professeur de mathématiques à Sorbonne Université, vice-président de la commission permanente du Conseil national des universités ;
Damien Sauze, maître de conférences en sciences économiques à l’université Lumière Lyon-II, vice-président de la commission permanente du Conseil national des universités.
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